On utilise plusieurs mots en France, pour désigner les soupes ou les potages. On parle aussi de bouillons, de consommés, de veloutés, et même de crème ! Mais quelles sont les différences entre les potages et les soupes ? Et qu’est-ce que signifie tous ces termes qui désignent le même type de plat : une entrée assez liquide, en purée ou en morceau ?
J’ai été longtemps professeur de technologie culinaire et je vais vous expliquer ce que signifient tous ces termes, leur histoire, et pourquoi aujourd’hui, on utilise plutôt l’un ou l’autre.
Je vais également vous donner dans cet article, des pistes pour comprendre comment on prépare une soupe ou un potage, un consommé ou un velouté. Enfin, vous trouverez tout au long de cet article, mes meilleures recettes de potages et de soupes.
A vos bols et cuillères, on entre dans le monde chaleureux et réconfortant des soupes et des potages ! 😋
La grande famille des potages et des soupes.
Quasiment toutes les entrées qui se mangent plutôt liquides et dans un bol ou une assiette creuse sont en fait des potages. Il n’y a pas de différences entre “potage” et “soupe” de nos jours, même s’il y en a eu par le temps passé. ce qui les différencie surtout, c’est leur origine et la manière dont on les prépare ou les sert :
- Le potage est cuit dans un pot et est servi tel quel, sans rien d’autre. Le mot date du XIIIème siècle.
- La soupe est un plat liquide que l’on sert sur une tranche de pain. C’est un terme du Moyen-Âge.
Voici l’histoire de la soupe et du potage, et comment ces termes sont arrivés jusqu’à nous.
Au début, il y avait la soupe.
La soupe est une base alimentaire universelle, que l’on a mangé depuis la nuit des temps, dans tous les pays sur tous les continents et qui se caractérise par l’adjonction d’un liquide chaud sur un base de céréales.
Le mot soupe a pour étymologie, “suppa”, un mot de bas latin issu de la racine indo-européenne sewb- qui signifie “verser” et par extension, “tremper quelque chose dans un liquide”.
La soupe est un plat du Moyen-Âge, généralement populaire voire pauvre : il s’agit de verser sur une tranche de pain, un bouillon plus ou moins clair constitué avec les reste de légumes ou de viande que l’on a pu grapiller.
La soupe est un plat à part entière, souvent l’unique plat de la journée, et dans l’image d’Épinal, le plat complet et unique des paysans du Moyen-Âge. La soupe est un plat qui nourrit et qui ne se contente pas de faire office d’entrée d’un repas.
Les appellations de soupes que nous avons gardées en cuisine française en héritage des recettes anciennes, désignent bien souvent, des soupes qui sont des plats complets avec pain, du riz, des pâtes, parfois un peu de protéines, comme la soupe à l’oignon ou la soupe de poisson.
Le potage, un terme moderne.
Le potage est un terme qui apparaît au XIIIème siècle. “Potage” signifie littéralement ce que l’on met dans le pot, donc ce que l’on cuit au pot.
or ce que l’on cuit au pot est plus généreux par rapport à une soupe : il y a de la viande, de la matière grasse, et surtout moins d’eau. Cela ressemble plus à un ragoût qu’à une soupe liquide qui a besoin de pain pour être mangé (et non bue).
Le terme potage va peu à peu envahir le terme soupe : à la Renaissance (XVIème siècle), s’opère en France une révolution gastronomique. Les plats sont de moins en moins épicés, aigre, douce (on mettait des épices, des acides comme le verjus et le vinaigre, du sucre, dans les plats du moyen-âge). Le beurre et la crème deviennent de plus en plus présents. Les légumes aussi, sous l’influence notamment de l’Italie… Il fallait bien un terme pour désigner tout cela.
Le potage, un service à lui tout seul au XVIIème siècle.
Le terme “potage” commence à remplacer la “soupe” à l’essor de la grande cuisine, surtout à partir du XVII ème siècle. Il est plus “chic”, moins populaire et moins “paysan”, avec tout le mépris d’une classe de privilégiés envers les classes moins riches.
Le mot potage signifiant “cuire dans un pot”, il va désigner à partir de ce grand siècle, aussi bien des ragoûts que les soupes. Les potages sont les mets qui constituent le premier service, avec les entrées et après les hors-d’œuvre. Ce sont des plats plus raffinés qu’une simple soupe et ils contiennent souvent des légumes.
Au siècle de Louis XIV, les légumes explosent. Le “Potager du Roi” créé en 1678 par Jean-Baptiste La Quintinie devient un des joyaux de la couronne et une source d’inspiration sans limite pour les nouveaux chefs cuisiniers. A partir de ce moment-là, les légumes sont des ingrédients que l’on retrouve dans tous les plats, dont le potage.
Le potage devient alors une soupe plus légère que les ragoûts anciens cuits au pot. Les potages sont confectionnés avec de plus en plus de légumes qui, contrairement à la soupe, ne nourrit pas mais fait une sorte d’entre-acte entre les autres services. C’est à cette époque que sera valorisé le consommé ou le bouillon clair, les potages taillés, les potages passés (en purée), faciles à digérer er les crèmes et les veloutés, plus gourmands que l’on déguste en petite quantité.
Les différents potages de la cuisine française.
Il existe 5 grandes catégories de potages :
- les potages clairs,
- les potages taillés,
- les potages purées de légumes frais ou de légumes secs,
- les potages liés,
- les soupes de poissons et crustacés.
Les potages clairs : bouillons et consommés.
Les potages clairs sont des bouillons, c’est-à-dire un liquide dans lequel on a cuit des aliments mais sans que l’on serve les aliments solides. Seul le liquide, l’extrait des saveurs de ces aliments est valorisé. Cet extrait ou bouillon est appelé marmite en cuisine française : on plonge des éléments sapides (ceux qui donne du goût) dans une grande quantité d’eau froide que l’on porte peu à peu à ébullition et que l’on fait mijoter. Le fait de partir d’eau froide permet un échange des saveurs entre les aliments et l’eau, une sorte d’équilibrage qui s’appelle l’osmose en chimie. L’eau se charge des saveurs des aliments qu’on y a plongé.
Pour servir le bouillon, on le clarifie, c’est-à-dire qu’on lui ôte toutes les petites particules en suspension afin qu’il devienne translucide. Le bouillon clarifié s’appelle le consommé. On lui adjoint alors des petits légumes cuits à part, coupés en brunoise (petits dés) ou en julienne (filaments), ou on le lie avec de la crème et des œufs (cela s’appelle aussi un velouté, voir plus bas).
Mes quelques recettes de consommés et bouillons :
Les potages taillés.
Les potages taillés sont des potages qui sont le résultat direct de la cuisson des légumes dans un liquide, eau ou bouillon. Les légumes qui restent apparents lors du service sont taillés en brunoise, des petits cubes ou en paysanne qui est une coupe en petites lamelles. Je recommande toujours de bien saler le liquide de cuisson pour qu’il y ai un échange de saveur entre les légumes et l’eau et surtout de commencer la cuisson à froid, pour que l’échange se fasse totalement, le bouillon dans lequel baigne les légumes étant aussi important que les légumes.
Ces potages étaient servis traditionnellement avec des croûtons de pain et du fromage râpé.
Le potage taillé emblématique avec tout une série de légumes de saison est le potage cultivateur. Il est normalement agrémenté de lard blanchi ou de poitrine de porc. Mais tu peux complètement le réaliser sans. Et tu peux varier les légumes au fil des saisons.
La soupe au pistou ou le minestrone sont des potages taillés, comme le sont les potées par exemple. Voici mes recettes à base de légumes taillés :
Les potages purées.
Les potage purées sont des potages taillés qui ont été mixés. Il n’ont normalement pas de liaison autres que la purée de légumes, mais peuvent être enrichis de crème et de beurre.
Ce sont souvent des potages que l’ont fait facilement, comme le potage lyonnais, ou la vichyssoise aux poireaux et pommes de terre. Les appellations désignent souvent leur composition, ainsi :
- Condé sera à base de haricots rouges,
- Saint-Germain sera à base de petits pois,
- Freneuse sera à base de navets,
- Parisienne sera à base de poireaux,
- Parmentier à base de pommes de terre, etc. .
Parfois ces potages purées sont liés et ils deviennent alors des crèmes et des veloutés.
Les potages liés : crèmes et veloutés.
Un potage crème ou velouté est un potage purée ou bouillon lié avec une sauce blanche (roux blanc + bouillon), des jaunes d’œufs et de la crème. On le nomme crème quand il y a plus de crème et que la sauce blanche est remplacée par une sauce Béchamel (roux blanc + lait).
Par extension, on désigne souvent des potages purée non liés mais crémés comme étant des crème ou des veloutés mais c’est un abus de langage.
Les soupes de poissons et les bisques.
Les soupes de poissons sont par définition des potages purée à base de poissons. On peut bien entendu réaliser une crème de poisson en la liant au roux blanc et en la crémant et même des crème à base de coquillage comme la crème dieppoise, à base moules de bouchot.
Les bisques sont des fumets extraits de carapaces de crustacés, liés normalement au riz cuit ou à la fécule de riz. Quand je les réalise, je préfère juste les crémer, c’est plus léger.