Il fait encore beau et même si depuis hier nous sommes officiellement en automne, c’est encore l’été. Alors pourquoi pas un autre petit verre de rosé et surtout un petit tour en Provence. Je t’emmène à ma suite au Domaine de Figuière pour apprendre comment on crée un vin rosé.
Les couleurs du vin rosé
Tu as sûrement remarqué que les rosés n’ont pas tous la même couleur, et que la couleur rose pâle ou saumon se portait franchement bien ces dernières années… Si tu compares par exemple un rosé de Tavel, quasi rouge avec un gris de Provence, c’est vraiment le grand écart ! Cela est dû à leur manière d’être produits.
En Provence, on aime les rosés clairs : souvent, cela donne des vins très légers… mais sur le Domaine de Figuière, la nature du sol très minérale, permet d’obtenir des rosés peu colorés qui ont cependant de la structure, du corps et des saveurs marquées. Ils peuvent t’accompagner en apéritif ou au repas.
Grains rouges, pulpe blanche ou rouge… les raisins du vin rosé
Le rosé est produit avec des raisins noirs, qui ont la pulpe blanche ou la pulpe rouge, cela dépend des cépages. Ex : le pinot noir a la pulpe blanche alors que le grenache noir a une peau noire et une pulpe rouge clair. Les rosés du Domaine de Figuière sont élaborés à partir de Cabernet, Cinsault, Syrah, Grenache et Mourvèdre.
Dans un grain de raisin, c’est essentiellement dans la peau que tu trouves les pigments (les anthocyanes). Quand tu désires un vin rouge, par exemple, et que tu utilises un cépage (variété de la vigne) qui a la peau noire mais la chair blanche comme le pinot noir, il te faut laisser macérer les peaux dans le jus pour qu’elles le colorent. Dans certains vins, pour avoir une couleur très intense, tu utilises des cépages dits « teinturiers » ou alors tu laisses macérer les peaux plus longtemps. Pour un rosé, c’est un peu la même chose : on fabrique des rosés à partir de tous les raisins noirs, à chair blanche ou colorée.
Nota : il est interdit en France d’élaborer un rosé en mélangeant du vin rouge et du vin blanc… sauf pour le champagne où tu trouves soit des rosés élaborés comme des rosés tranquilles (sans bulles), soit des rosés élaborés en mélangeant les jus blancs et rouges. Mais les grands champagnes de gastronomie sont des champagnes rosés de saignée généralement!
Le temps de macération et le pressurage donnent la couleur et le goût du vin rosé!
Suivons François Combard, du domaine de Figuières, et plus précisément le devenir d’une grappe. Le raisin est ramassé à la main ou à la machine, cela dépend de la catégorie du vin. La machine s’est chargée déjà d’érafler les raisins (on ôte le bois de la grappe), sinon, les grappes sont éraflées à l’arrivée au domaine. Les grains sont ensuite foulés (ils passent dans une sorte de vis qui les fait avancer, les éclate et les mène aux cuves de macération ou au pressoir.
Les grains sont refroidis dans une espèce de serpentin pour que leur jus ne partent pas tout de suite en fermentation (dès que les raisins sont un peu éclatés, le jus peu commencer à produire de l’alcool, alors le froid modère son ardeur et empêche le phénomène).
Les grains de raisin se retrouvent dans de grandes cuves où ils vont macérées : c’est à ce moment-là que les peaux vont plus ou moins colorer le jus. Si le vinificateur désire un vin intense, aux saveurs prononcées et une robe rose soutenu il laisserai longtemps macérer. La méthode s’appelle réaliser un rosé de saignée. On sépare ensuite les peaux du jus obtenu.
Si au contraire le vinificateur désire un rosé plus léger, aérien et une robe claire, il diminuera cette étape, jusqu’à la supprimer. Alors il pressurera les grains directement, mais très lentement pour que les peaux donnent quand même de la couleur au jus. On appelle cette méthode faire un rosé de pressurage direct. C’est ce que l’on fait au Domaine de Figuière pour obtenir cette couleur si belle et si éclatante.
Débourbage et fermentation alcoolique: la création du vin rosé
Le jus contient des particules fines, que l’on appelle les lies. Elles sont souvent chargées d’impuretés. On les laisse se déposer au fond de la cuve pendant 24h pour les séparer ensuite du jus. C’est le débourbage et cela permet d’avoir des vins fins. Mais les lies sont aussi chargées de nutriments et d’arômes. Au Domaine de Figuière ont les sépare, on les filtre et on récupère le meilleur des lies, les lies fines. Elles seront alors réinjectées dans certains vins pour l’élevage.
Ensuite, le jus est mis en cuves inox, thermorégulées pour bien maîtriser le processus, et la fermentation opère : les sucres contenus dans le jus se transforment en alcool sous l’action des levures présentes dans le jus lui-même et certaines qu’on lui ajoute. Une fois la fermentation terminée, on obtient le vin.
Les rosés sont fragiles. Ils s’oxydent facilement au contact de l’air et de son oxygène. Et comme on ne veut pas qu’ils tournent vinaigre, on les protège. Souvent avec des sulfites… qu’on injecte pendant la transformation du raisin en vin pour contrôler son oxydation, mais aussi sa fermentation ou éviter que le vin ne tourne une fois mis en bouteille. Or le sulfite, ce n’est pas génial pour l’humain… François explique qu’il utilise une autre méthode pour limiter l’utilisation de sulfites : pendant la fermentation, il se produit beaucoup de gaz carbonique. C’est d’ailleurs dangereux pour le producteur si la salle dans laquelle s’opère la fermentation est mal aérée. Il y a eu pas mal d’accidents dans les caves, notamment, quand la fermentation s’y déroulait : il fallait bien aérer avant d’y entrer, sinon on pouvait d’évanouir très vite et malheureusement manquer d’air… Le domaine de Figuière utilise des cuves de fermentation qui récupèrent le gaz carbonique et ils le réutilisent dans les tuyaux et au pressoir pendant toute la durée du processus. Cela limite grandement l’utilisation des sulfites. Les jus sont protégés et ma tête aussi…
L’élevage du vin rosé
Il existe 6 cuvées de rosés au Domaine de Figuière. Selon les gammes, le vin sera plus ou moins longtemps élevé, c’est-à-dire qu’il attend en cuve ou en barrique de chêne que le temps fasse son effet : le temps est important pour le vin et comme l’indique François Combard, au Domaine de Figuière, on ne stresse pas le vin. Les vins rosés Signature « Magali », Première ou Confidentielle vont vivre des temps différents en cuve inox pour des résultats allant de la pétulance du vin (comme Magali Combard dont le rosé signature porte le nom), une élégance de terroir minéral et marin pour le Première et un vin de gastronomie plus intense pour le Confidentielle.
La cuvée Absolu est fermentée et élevée en barriques de chêne, entre 8 et 10 mois, où il acquiert du gras, de la texture sans cependant trop se charger de ses arômes. Il porte très bien son nom, ce vin : composé de 60% de Mourvèdre et 40% de grenache, les raisins sont récoltés selon les parcelles, pour en garder toute l’expression. Il faut dire que le domaine de Figuière se trouve sur le haut d’une colline dont le sol affleure partout de schiste veiné de quartz blanc ou de schiste sablo-siciceux. Cette sacrée minéralité donne aux vins du domaine beaucoup de droiture, une certaine salinité et des saveurs ciselées.
C’est bien entendu dans l’Absolu que la nature du sol s’exprime le mieux. Comme les cépages différents sont vinifiées dans des barriques différentes, on garde les caractéristiques de chacun avant l’assemblage et l’élevage. C’est un sacré boulot qui justifie qu’il n’y ait que 3000 bouteilles par an et que ce vin peut vieillir en cave sans problème pendant 5 ans. Un rosé que l’on dit de Haute-gastronomie et que je te conseille de consommer avec une langouste grillée et flambée ou une côte de veau aux girolles…