Voici la recette de mon gaspacho, une recette traditionnelle comme je l’ai apprise à Malaga: el gazpacho andaluz. J’ai vécu en Espagne une partie de mon enfance, parce que mes parents, artistes, ont eu tour à tour le prix Casa Velázquez, une sorte de prix Médicis à l’espagnole, ce qui m’a fait séjourner occasionnellement puis vivre en Espagne presque 4 ans de ma vie. En plus? mon frère, comme papa d’ailleurs, amoureux de l’Ibérie, a épousé une Catalane du sud… te dire que la péninsule est un peu dans mes gènes, ce n’est pas vraiment mentir. Je parle plus ou moins espagnol, comprends le catalan quand il est écrit, et je me sens là-bas comme un poisson dans l’eau. Dans ma cuisine, paraissent pas mal de traces de la cuisine espagnole, les saveurs que j’ai goûté petite, et qui me titillent encore les papilles à l’occasion.
J’ai grandi avec l’arroz, le conejo al ajo, le pez espada, la dorada al sal, l’orchata, et… le gazpacho andaluz (d’autant que je vivais à Torremolinos, village très touristique du sud de l’Espagne, parce qu’il était à quelques encablures de mon collegio francès à Malaga et que le bus scolaire passait). Pour te dire que j’en ai mangé, du gaspacho… de mai à octobre sans problème.
Je te donne ma recette de ce qui peut être le gaspacho traditionnel, celle que je fais avec mes papilles d’enfant, celle qui allie à la fois les saveurs des tomates, celles du vinaigre et du pain, la pointe d’ail, d’huile… et de pimenton qui finit le tout en lui donnant une saveur un peu fumée.
Qu’est-ce que le gaspacho / Gazpacho ?
Le gaspacho (el gazpacho) est une soupe froide épaisse, relevée de vinaigre de Xérès, d’ail et liée au pain. Contrairement à une soupe glacé, le gaspacho n’est élaboré qu’avec des légumes crus. La préparation comprend quelques heures de marinade, car les fibres des légumes crus, pour être digestes, doivent mariner et être “cassées” par l’acidité du vinaigre. Cela permet aussi au gaspacho de gagner en saveur, les légumes se parfumant les uns les autres.
Cette recette est assez commune avec la recette itlaienne panzanella de ce point de vue: les légumes marinent entre eux et sont accompagnés de pain. Le gaspacho a aussi une parenté avec les recettes de ajoblanco, la soupe glacée à l’ail et aux amandes, qui serait même un de ses ancêtres. En effet, le gaspacho n’aurait été à l’origine qu’une soupe passée de pain, d’eau et d’huile d’olive à laquelle on ajoutait à l’occasion des amandes, de l’anchois ou de l’ail… C’est en tout cas une recette très ancienne dont on trouve des traces bien avant l’arrivée de la tomate et du poivron sur le continent européen. Je rappelle qu’avant le 16ème siècle, ces denrées américaines n’existaient pas en Europe et qu’elles n’y furent popularisées qu’à partir du 18ème siècle. Il y a par exemple des mentions du gazpacho dans le Dictionnaire de la langue castillane de Covarrubias (1611) et du “guazpachos” dans le Don Quijote de Cervantes (1615), mais sans tomates, bien sûr: le pain, l’ail, l’eau, le sucre et le vinaigre en sont les bases. La tomate ne vient que plus tard, comme le poivron, et si le gaspacho était une nourriture de pauvre, de paysan qui devait à la fois se nourrir et se rafraîchir, il ne devint le plat que l’on connaît aujourd’hui qu’au 19ème siècle. Il a gardé cependant une trace de sont origine, le pain, utilisé comme aliment humide et surtout, comme toute la cuisine du moyen-âge, comme liaison des sauces et des soupes; au contraire du 18ème siècle qui introduit le roux, la liaison à la farine.
Il existe autant de recettes de gaspacho que de régions d’Espagne, et chaque fois, les ingrédients changent ainsi que l’ordre d’incorporation. Et si je parle ici de recette traditionnelle, tout comme toutes les recettes régionales du monde, c’est en fait la recette la plus communément admise comme la recette de base. A toi, d’y apporter ta pâte et ta créativité. Il n’y a pas meilleure tradition que celle qui évolue!
Qu’est-ce que je bois avec mon gaspacho ?
Quitte à être au sud de l’Espagne, restons-y! Tu peux déguster cette soupe glacée en apéritif ou en entrée avec un Malaga, vin doux passerillé (on fait en sorte d’avoir des grains très concentrés en sucres). Il se boit frais et par petites quantités, car il titre à 15°. Tu peux aussi déguster le gaspacho avec un fino, un Jérez blanc sec, aux saveurs d’amandes qui lui aussi, titre fort et se boit très frais. Sinon, je te conseille un vin rosé qui a du corps comme le Canon du Maréchal de chez Cazes (6€) ou un Tavel.
Enjoy, à manger glacé, bien sûr, mais en ce moment, cela ne devrait pas trop poser de problèmes…
Mon gaspacho, recette traditionnelle
Ingrédients
- 1 kg tomates bio bien mûres
- 1 poivron rouge
- 1 poivron jaune
- 1/2 concombre épineux le petit qui a l’air d’un gros cornichon
- 4 oignons nouveaux
- 2 gousses ail
- 150 g pain au levain rassis
- 15 cl huile d’olive
- 5 cl vinaigre de Xérès
- 2 pincées pimenton
- Fleur de sel
Instructions
- Laver et réserver 1/4 de poivrons rouges , 1/4 du poivron jaune et 1 tige d’oignon.
- Dans un grand saladier, couper tous le reste des légumes, ajouter le pain en morceaux, l’huile, le vinaigre, le pimenton et quelques pincées de sel. Y hacher l’ail. Mélanger, couvrir d’un film et laisser reposer au moins 2 h voire toute une nuit.
- Couper en petit dés le reste des poivrons et en rondelles la tige d’oignon. Réserver.
- Mixer le mélange mis à mariner en ajoutant de l’eau fraîche si besoin jusqu’à obtenir la consistance d’un velouté. Ajouter du vinaigre, de l’huile et du sel si besoin. Goûter… il faut adapter la recette à ton palais.
- Servir très frais parsemé de dés de légumes.