Rouelle de jambon à la bière ambrée, la bière de Noël, une tradition ancienne…

La semaine dernière, je suis allée à la dégustation des bières de Noël d’Elisabeth Pierre.

Pour ceux qui ne la suivent pas ou ne la connaissent pas, Elisabeth est la Fille de l’Orge, une bièrologue qui anime des ateliers et des formations autour des bières. Dégustations, accords mets-bières, histoire de la bière… avec elle, tu es sûr d’apprendre une tonne de choses tout en savourant, dégustant, tout en passant un très agréable moment…

…et c’est exactement comme cela que ma soirée s’est déroulée. Et c’est exactement aussi ce qui m’a donné l’idée d’accorder la bière à mon premier plat pour repas festif dont je vais émailler le mois de décembre sur ce blog.

J’ai donc préparé une rouelle de jambon à la bière, facile à faire, très jolie à présenter entière ou en fines tranches, avec une purée de pommes de terre maison, simple ici, ou truffée le jour J. Un plat économique également, pour grandes tablées, qui te laisse le loisir de préparer tes entrées ou de profiter de la famille, puis qu’il mijote tranquillement 3 heures.

La bière de Noël est une tradition qui remonte aux premiers brasseurs. En fait, pour bien brasser, à l’époque où le frigo n’était pas encore inventé, il fallait une température assez basse (ce qui permettait aux levures de ne pas devenir anarchiques). Le premier brassin commençait donc en octobre sous nos contrées tempérées. Le 4 octobre exactement, fête agraire et païenne (fête de Cérès ou de Déméter). Or il faut 80 jours pour qu’un brassin « mûrisse ». Ce premier brassin était donc le cadeau des brasseurs à ses clients : chaque bière de Noël étant une nouvelle recette, une nouvelle invention du brasseur avant les brassins suivants, plus réguliers, plus normatifs… C’est un peu comme la bière de mars, autre tradition, qui suivant les cycles de 80 jours de brassage et qui est la dernière de l’année…

Il faut savoir qu’une bière de Noël est une bière de garde. Si elle est bien maltée et bien alcoolisée, elle évolue en bouteille et peut se garder plus d’un an. Il ne faut donc pas hésiter à acheter les bières de Noël, qui sont souvent, comme dans l’ancien temps, d’une recette originale et qui changent chaque année. C’est d’autant plus vrai si tu te procures ta bière de Noël auprès d’un brasseur indépendant.

Ce soir-là, Elisabeth Pierre nous a fait découvrir quelques bières de Noël très différentes les unes des autres, et les accorde avec des fromages:

– La Gaillarde, bière de couleur or, trouble, peu alcoolisée et blonde. Très épicée au nez, alors qu’elle n’en contient pas, elle était douce et fruitée. Une recette originale, travaillée avec beaucoup de grains par Benjamin Moinet (il est de Brive… tiens ! on se serait pas douté avec un nom de bière pareil !). Nous la dégustons avec un fromage bien lacté de Suisse, un gruyère frais et herbeux.

– Avec la Joyeuse, nous passons dans le Berry (mon pays) : le nez est citron vert, eucalyptus, résineux… C’est uen bière qui est encore peu alcoolisée (4.8°). Elle a des saveurs de caramel très puissant, avec du réglisse et du gingembre. Mais peu d’épices de Noël, encore, alors que c’est plutôt la tendance généralement. La mimolette semi-vieille qui l’accompagne ne lui fait pas défaut.

– La Mandrin de Vincent Gachet est plus douce, plus herbeuse aussi. Elle est à base d’épices et d’écorces d’orange. Il y a de la coriandre, de l’eau des Alpes, on le sent, la minéralité de cette eau influe sur le malt et la rend légère en bouche, facile à boire, très rafraîchissante. Basé à St Martin d’Hyères, Vincent Gachet a l’habitude de travailler des bases de sa région : de la noix de Grenoble, du sapin, du chanvre. Il aime aussi distiller ses brassins et vieillit une sorte de whisky-rhum de bière en fûts. On passe à un Mont-D’or qui soutient parfaitement la richesse de cette bière.

– En Franche-Comté, dans la vallée de la Loue, Daniel Longval, québécois, est tombé amoureux d’une suissesse. Ce mélange des origines a fait la Bière Entre Deux Monde, travaillée tout à la main, avec beaucoup de malts. Elle a ce côté amérindien, et en même temps, très européen, avec beaucoup de seigle. Elle titre à 8°.

– La Page 24: une bière de Calais, dans toute sa splendeur. Une bière typique du Nord, aux notes alcoolisées et à la saveur cacao. Ici, on est sur la bière de Noël qu’on s’attend à avoir, des épices, de la douceur, de l’onctuosité. C’est la passion pour le houblon et sa théoricienne, la Moinesse Hildegarde de Bingen, qui a donné son nom à cette bière : dans son traité, il paraît qu’il manque la page 24… Le voici complété, avec cette bière bien houblonnée, riche en goût et supportera parfaitement le gras et l’onctuosité de la Fourme de Montbrisson que je grignote avec…

Passons à table :